La Supercomplication signée Patek Philippe aux enchères

Patek Philippe fête ses 175 ans d’existence et la maison Sotheby’s en profite pour vendre une véritable légende: la montre de poche conçue à partir de 1925, achevée en 1932 et livrée en 1933 pour Henry Graves Jr, très riche banquier américain. Ce lot crèvera-t-il le plafond avec un nouveau record pour une montre signée Patek? Réponse mardi prochain, le 11 novembre. Et l’on peut aisément s’y attendre, puisqu’avec 24 complications, la « Henry Graves » était la montre la plus compliquée du monde, jusqu’à ce que Patek conçoive la montre de poche Calibre 89 et ses 33 complications, en 1989, à l’occasion de son 150ème anniversaire. Elle est d’ailleurs estimée à plus de 15 millions de francs suisses!

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Qui était Henry Graves Jr?

Mais pour commencer la description de la Supercomplication, revenons au contexte historique et à la biographie de Henry Graves Jr. Lorsqu’il commande sa montre en 1925, Graves compte parmi les plus riches américains, profitant de la folie des années 20 (entre 1920 et 1929, la production industrielle augmente de 50%). Il fonde et dirige la banque d’affaires Maxwell & Graves. Il se livre à une véritable compétition avec un autre industriel de renom, Packard. Entre les deux, la lutte fût âpre, à qui s’offrira le plus de montres et à qui s’offrira la montre la plus chère. Il commande donc à Patek Philippe la montre la plus compliquée du monde. Et Patek Philippe mettra sept années à la concevoir et la livrera à son commanditaire . Malgré la qualité de sa collection, la Supercomplication a mis Packard échec et mat. Et pour cause, le cahier des charges établi par Graves était extrêmement ambitieux: sa montre devait être de loin la plus compliquée du monde, autrement plus compliquée de la montre conçue par Patek pour son concurrent Packard, avec une carte céleste (le référence 198.023), la Leroy N°1 ou encore la fameuse « Marie-Antoinette » de Breguet. Le tout pour la somme de 60 000 francs suisses de l’époque, soit (très) approximativement, entre 160 000 et 220 000 euros d’aujourd’hui. La montre est restée la propriété d’Henry Graves, Jr.  à sa mort, en 1953. Elle a ensuite appartenu à ses héritiers: Gwendolen Graves Fullerton, , puis Reginald H. “Pete” Fullerton, . Elle a ensuite été achetée par Seth G. Atwood, fondateur du Time Museum de Rockford en Illinois, où elle fut exposée , puis à un collectionneur privé. Elle a par ailleurs été exposée au public au musée Patek de Genève . Cette montre de poche accueille vingt-quatre complications dont:
  • une répétition minute avec carillon Westminster,
  • une grande et petite sonnerie,
  • un chronographe,
  • une rattrapante,
  • un quantième perpétuel,
  • une phase de Lune,
  • une équation du temps,
  • affichage du temps réel,
  • affichage du temps sidéral (équation du temps marchante),
  • un double indicateur de réserve de marche,
  • un réveil,
  • l’heure du lever et du coucher du soleil,
  • une carte céleste…
  • Parmi les horlogers qui ont collaboré à la réalisation de ce chef d’oeuvre, on trouve des artisans de la Vallée de Joux, chacun spécialiste d’un domaine en particulier: Paul Piguet pour les différents travaux de détail de la montre , son fils Henri Daniel Piguet pour le mécanisme de mise à l’heure, et le petit-fils Michel Piguet pour le mécanisme de la grande sonnerie (Westminster) , David Alfred Nicole du Sentier pour les finitions et le repassage de la montre, Charles Rochat : les axes de roues du mouvement et  du chronographe , Louis Rochat-Benoit: le mécanisme du chronographe à rattrapante, Luc Rochat : le boîtier de la montre , Juste Aubert: le mécanisme de remontage ou encore Paul Auguste Golay du Sentier à  Corsier-sur-Vevey : le mécanisme du calendrier perpétuel, de l’équation du temps et le mécanisme du lever et coucher du soleil. On constate avec cette liste que cette Supercompliations doit beaucoup à deux familles en particulier: les Piguet et les Rochat.
  • La conception du mouvement découle justement de cette division du travail puisque chacun des horlogers cités plus haut a réalisé sa complication pour l’ajouter au mécanisme de base. Et tout l’enjeu de sa conception a résidé dans la compatibilité des complications entre elles, à une époque ou la conception assisté par ordinateur n’existait absolument pas. Et l’éloignement relatif des horlogers, entre le Sentier, les Bioux, le Brassus ou encore l’Abbaye n’arrangeait certainement pas les choses. C’est pour cette raison que la réalisation a duré aussi longtemps, sept années.
  • Si cette montre est exceptionnelle par le nombre de complications qu’elle offre, elle l’est tout autant en matière de dimensions. jugez-en vous même: 74mm de diamètre, 36mm d’épaisseur. Et surtout: plus d’un demi kilo!!! Pour être plus excat, 536 grammes. A lui seul, le boîtier en or jaune pèse 250 grammes.
  • Le cadran en émail a été conçu par les Frères Stern S.A. Il supporte 7 niveaux différents d’aiguilles: les deux aiguilles de la rattrapante, les deux aiguilles des heures et minutes, l’aiguille du réveil central, les deux aiguilles de la réserve de marche.

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